Uranium:
Properties and biological effects
after internal contamination
Annales de Biologie Clinique. Volume 67, Number 1, 23-38, janvier-février 2009, revue généraleDOI : 10.1684/abc.2008.0290Résumé SummaryAuthor(s) : M Souidi, E Tissandie, R Racine, H Ben Soussan, C Rouas, E Grignard, I Dublineau, P Gourmelon, P Lestaevel, Y Gueguen , Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, Direction de la radioprotection de l’homme, IRSN, Fontenay-aux-Roses.Summary : Uranium is a radionuclide present in the environment since the origin of the Earth. In addition to natural uranium, recent deposits from industrial or military activities are acknowledged. Uranium’s toxicity is due to a combination of its chemical (heavy metal) and radiological properties (emission of ionizing radiations). Acute toxicity induces an important weight loss and signs of renal and cerebral impairment. Alterations of bone growth, modifications of the reproductive system and carcinogenic effects are also often seen. On the contrary, the biological effects of a chronic exposure to low doses are unwell known. However, results from different recent studies suggest that a chronic contamination with low levels of uranium induces subtle but significant levels. Indeed, an internal contamination of rats for several weeks leads to detection of uranium in many cerebral structures, in association with an alteration of short-term memory and an increase of anxiety level. Biological effects of uranium on the metabolisms of xenobiotics, steroid hormones and vitamin D were described in the liver, testis and kidneys. These recent scientific data suggest that uranium could participate to increase of health risks linked to environmental pollution.Keywords : uranium, chronic contamination, acute exposurePicturesARTICLEAuteur(s) : M Souidi, E Tissandie, R Racine, H Ben Soussan, C Rouas, E Grignard, I Dublineau, P Gourmelon, P Lestaevel, Y Gueguen
Institut de Radioprotection et de Sûreté Nucléaire, Direction de la radioprotection de l’homme, IRSN, Fontenay-aux-Roses
Article reçu le 30 Juillet 2008, accepté le 7 Octobre 2008
La pollution de l’environnement est devenue l’une des préoccupations majeures du public. Tous les milieux (aquatique, atmosphérique et terrestre) sont concernés par cette pollution, qu’elle soit d’origine anthropique (émissions des moteurs ou des usines, stations d’épuration, etc.) ou naturelle (éruption volcanique, érosion, etc.). La croissance démographique et l’augmentation de l’activité industrielle contribuent pour une part considérable à la contamination de l’environnement. Parmi les nombreuses causes de pollution, nous pouvons citer par exemple l’utilisation d’engrais ou d’insecticides par l’industrie agricole, les rejets d’hydrocarbures (dégazage, marée noire) ou l’émission de métaux lourds (cadmium, mercure, plomb, etc.) autour des sites d’activités liés à la métallurgie. Cette pollution incessante, à laquelle chacun est exposé, peut avoir un impact sur la santé humaine. Parmi ces polluants, certains sont des perturbateurs endocriniens et peuvent avoir un impact sur l’équilibre hormonal de l’espèce humaine. On peut citer par exemple les résidus de dichlorodiphényltrichloroéthane (DDT) ou le chlordane, des insecticides qui sont des agonistes des estrogènes et de la progestérone et altèrent la fertilité ; les dithiocarbamates, des fongicides qui perturbent la synthèse de neurotransmetteurs comme l’adrénaline ; le cadmium, un métal lourd qui perturbe le métabolisme de la vitamine D ; ou les dioxines, qui diminuent le taux d’hormones thyroïdiennes. Ainsi, l’augmentation de la prévalence de certaines maladies dans les pays industrialisés soumis à cette pollution, telles que les cancers ou les maladies cardiovasculaires et neurodégénératives, est au cœur de l’actualité médicale et aussi sociale et médiatique. Les résultats de la recherche scientifique laissent donc à penser que ces maladies pourraient être également la conséquence d’une altération lente et progressive de notre environnement par l’utilisation de substances chimiques et radiologiques. L’exposition à l’uranium, qui possède une double toxicité (chimique et radiologique) pourrait participer à l’augmentation des risques potentiels émergents liés à une contamination éventuelle de l’environnement.
L’uranium est un radionucléide présent sur la terre depuis son origine. Il est retrouvé aussi bien dans le sol, l’air et l’eau que dans l’ensemble de la chaîne alimentaire en raison de ce dépôt naturel. A cette provenance naturelle de l’uranium s’ajoutent des apports résultant des activités industrielles de l’homme. En effet, depuis le XXe siècle, les sources d’exposition à l’uranium ont considérablement augmenté du fait des activités humaines (centrales nucléaires, exploitation des mines d’uranium, déchets radioactifs, etc.). En dehors des activités industrielles liées au cycle du combustible du nucléaire qui expose une population bien identifiée (les travailleurs du nucléaire), les émissions des industries de retraitement participent aussi à l’augmentation de l’exposition du public. Par ailleurs, l’utilisation d’obus contenant de l’uranium lors des derniers conflits internationaux a conduit à l’augmentation du taux de dissémination de ce radioélément dans l’environnement. Ces différentes situations peuvent donc contribuer à augmenter la probabilité d’exposition de l’homme, et induire donc d’éventuels effets délétères en termes de santé humaine.
Cette revue propose donc de faire une synthèse des connaissances sur l’uranium, en partant de ses propriétés, puis de sa dispersion dans l’environnement, suivi par sa biocinétique d’entrée et de distribution, ainsi que ses effets biologiques induits dans différents organes comme les reins, l’os, le système nerveux central, les gonades, le foie, les poumons, le système digestif, dans le cas d’une contamination aiguë puis après contamination chronique à faible dose.
Les radionucléides dans l’environnement
Les radionucléides existent naturellement ou sont produits artificiellement dans les réacteurs nucléaires. Les radionucléides naturels se divisent en deux catégories : les radionucléides primordiaux, qui étaient présents au moment de la formation de la terre, et les radionucléides cosmogéniques, produits en permanence par le bombardement des molécules gazeuses de l’atmosphère terrestre par les rayons cosmiques. Le potassium 40, l’uranium 238 et le thorium 232 sont les principaux radionucléides primordiaux. Ces éléments, ainsi que leurs descendants radioactifs, sont présents dans les roches, les sols et se retrouvent à l’état de traces dans les eaux et les végétaux. Les quatre principaux radionucléides cosmogéniques sont le carbone 14, le béryllium 7, le sodium 22 et le tritium. Ils sont déposés sur la terre par l’action du brassage atmosphérique, des précipitations et de la pesanteur. Les radionucléides d’origine artificielle sont utilisés pour les activités médicales (technétium 99m, thallium 201, iode 131, etc.) et dans l’industrie nucléaire civile et militaire (plutonium 239, strontium 90, césium 137, etc.) [1].Parmi ces radionucléides, l’uranium représente une source de contamination potentiellement importante pour la population.
L’uranium
Propriétés et utilisations
Découvert en 1789 par le chimiste allemand Martin Klaproth, l’uranium est l’élément le plus lourd présent naturellement dans les roches, les sols et l’eau. Sa propriété radioactive a été mise en évidence une centaine d’années plus tard, en 1896, par le physicien français Henri Becquerel.La concentration moyenne de l’uranium dans la croûte terrestre est de 2 mg/kg [2]. Elle varie en fonction de la constitution des roches. On rencontre l’uranium sous différentes formes minéralogiques, aussi bien dans les terrains granitiques que sédimentaires. Il se combine, par exemple avec l’oxygène dans l’uraninite et la pechblende, deux des principaux minerais d’uranium, constitués d’oxyde uraneux (UO2).
De symbole U, l’uranium est le dernier élément naturel du tableau périodique de Mendeleïev. Il possède le plus grand numéro atomique (Z = 92) et fait partie de la famille des actinides. L’atome d’uranium possède 6 électrons périphériques qui sont facilement extractibles. Il peut se présenter aux valences III, IV, V et VI. En solution aqueuse, l’uranium est préférentiellement à la valence VI et forme différents complexes par l’intermédiaire de l’ion uranyle UO22+. Dans les fluides biologiques, il est présent uniquement sous forme d’ion uranyle principalement complexé avec les ions carbonate ou citrate [3].
L’uranium possède 17 isotopes avec des nombres de masse compris entre 227 et 242. Parmi ces isotopes, trois seulement sont présents à l’état naturel : l’uranium 238 (238U, 99,28 %) ; l’uranium 235 (235U, 0,718 %) et l’uranium 234 (234U, 0,0054 %). Ces isotopes, tous radioactifs, se désintègrent principalement par émission de rayonnements α et possèdent des périodes très longues (tableau 1). D’autres isotopes peuvent être induits artificiellement, l’uranium 233 ou 236.
L’uranium 235 est le seul noyau naturel aisément fissible et il présente donc un intérêt énergétique et militaire. Les deux applications principales de la fission sont les réacteurs nucléaires producteurs d’électricité et les armes nucléaires. La plupart des réacteurs nucléaires utilisent de l’uranium dit enrichi (UE). L’enrichissement consiste donc à augmenter la teneur en 235U de l’uranium naturel (UN, 0,7 % 235U) jusqu’à un niveau compris entre 3 et 5 % en vue de l’utiliser comme combustible ou jusqu’à un niveau supérieur à 90 % en vue de l’utiliser comme explosif. Le mélange restant après séparation de l’UE est appelé uranium appauvri (UA) car il contient très peu d’235U (0,3 % en moyenne). Il possède les mêmes propriétés chimiques que l’UN mais est 60 % moins radioactif (tableau 2). C’est à la fois un résidu de l’industrie nucléaire, disponible en très grande quantité et bon marché, et un matériau employé pour des utilisations non nucléaires. En effet, la fabrication d’une tonne d’UE à 3,5 % à partir d’UN entraîne la production de plus de quatre tonnes d’UA. Sa forte densité (19 g/cm3, environ 1,7 fois celle du plomb) et son prix favorisent son utilisation par rapport aux autres métaux de densité comparable comme l’iridium, l’osmium ou le tungstène, malgré sa radioactivité. Ses propriétés ont conduit à l’utiliser dans de nombreuses applications civiles et militaires : contrepoids ou lest dans les avions, boucliers de protection contre les rayonnements dans le matériel médical utilisé pour les radiothérapies et dans les conteneurs servant aux transports des matières radioactives, blindage dans les plaques de char d’assaut et plus particulièrement composant de projectile d’armes de guerre [4, 5].
Tableau 1 Caractéristiques des isotopes de l’uranium naturel.
Isotope | Périodes de décroissance | Masse relative (%) | Activité (Bq) pour 1 g d’uranium | Activité (%) |
238U | 4,5 milliards d’années | 99,28 | 12,4.103 | 48,2 |
235U | 0,7 milliard d’années | 0,72 | 5,8.102 | 2,3 |
234U | 0,25 million d’années | 5,40.10-3 | 12,5.103 | 49,5 |
Tableau 2 Composition et activité des 3 types d’uranium.
Masse d’235U (%) | Activité spécifique (kBq/g) | |
Uranium naturel | 0,7 | 25 |
Uranium enrichi | 3 | 42 |
Uranium appauvri | 0,3 | 14 |
Sources d’exposition
L’alimentation et l’eau potable constituent les deux principales sources d’exposition chronique à l’uranium (figure 1). L’homme ingère quotidiennement 1-2 μg d’uranium (sous forme d’uranyl) dans l’alimentation et à 1,5 μg dans l’eau de boisson [2]. Certaines régions sont naturellement riches en uranium. Ainsi, certaines populations de Finlande sont exposées à un taux d’UN dans leur eau de boisson 100 à 1 000 fois plus élevé que la moyenne [6]. Des concentrations d’uranium de 1,2 mg/L ont été détectées dans les eaux destinées ou non à la consommation humaine au Nouveau-Mexique [7], de 0,7 mg/L au Canada [8] et atteignant 20 mg/L en Finlande [9]. La combustion du charbon et des carburants constitue l’une des principales sources de contamination de l’air par l’uranium. On a signalé les teneurs en uranium suivantes dans l’atmosphère locale : New York, 0,4 ng/m3 [10] et Royaume-Uni, 0,02 ng/m3 [11]. La fumée de cigarette (deux paquets par jour) est responsable d’un apport individuel équivalent à 0,05 μg d’uranium par jour [12]. Si l’on suppose que le volume quotidien d’air respiré atteint 20 m3 et que la concentration moyenne d’uranium dans l’air de la ville est de 0,1 ng/m3, la dose quotidienne d’uranium inspirée par l’individu s’élève à environ 2,0 ng.A cette exposition naturelle, vient s’ajouter une exposition à l’UA et beaucoup plus rarement à l’UE du fait de l’activité humaine. Les résidus miniers laissés par le broyage et le traitement du minerai d’uranium ainsi que l’utilisation d’armes à l’UA lors des derniers conflits internationaux (Bosnie, Kosovo, Afghanistan, Irak, etc.) participent à la contamination de l’environnement et augmentent les sources d’exposition des populations locales [2, 13, 14]. De plus, certains engrais phosphatés employés dans l’agriculture présentent des teneurs élevées en uranium [15, 16].
Biocinétique
Le préambule à toute étude de toxicologie est la mise en place d’étude de biocinétique et de distribution dans les tissus, permettant de connaître le devenir biologique du toxique dans l’organisme.
Absorption
Les différents modes de pénétration de l’uranium dans l’organisme sont l’ingestion, l’inhalation et la blessure cutanée [17]. La contamination par inhalation concerne principalement des personnes à leur poste de travail dans l’industrie électronucléaire, ou des soldats exposés à des projectiles contenant de l’UA. En revanche, l’ingestion est la voie la plus fréquente pour l’exposition du public ; elle est due à la consommation d’eau ou d’aliments contaminés.Après ingestion, une faible quantité d’uranium est absorbée au niveau du tractus gastro-intestinal. Chez l’homme, le taux d’absorption intestinale est estimé à environ 1-1,5 % [18]. Les études réalisées chez l’animal montrent que ce taux varie en fonction de l’espèce, du régime alimentaire, de l’âge, de la forme physico-chimique du sel d’uranium et de la solubilité du composé [19-22]. Chez le rat, des études récentes ont montré que le taux de résorption était de 0,4 % dans le cas d’une ingestion d’eau contaminée par du nitrate d’uranyle [23].
L’intestin grêle est le lieu principal de résorption et de transfert de l’uranium depuis le bol alimentaire vers le compartiment sanguin [24]. Par ailleurs, cette étude indique que la voie de passage majoritaire est la voie transcellulaire (à plus de 80 %), ce qui pose la question des transporteurs impliqués dans le transport de l’uranium à travers l’intestin grêle. Aucune donnée expérimentale ne permet actuellement de répondre à cette question, d’autant que la nature de ces transporteurs dépend de la nature physicochimique de l’uranium dans le fluide gastro-intestinal.
Distribution et rétention
Une fois dans le sang, l’uranium est rapidement distribué aux organes cibles et majoritairement excrété par les urines. L’uranium plasmatique est associé à des molécules de faible poids moléculaire comme les ions carbonate ou citrate, ou bien lié à des protéines plasmatiques telles que la transferrine ou l’albumine [25, 26]. Quelques jours après son passage dans la circulation générale, la charge systémique d’uranium se retrouve principalement dans l’os et au niveau du cortex rénal (environ 90 %) et une partie beaucoup plus faible dans les tissus mous (poumons, rate, foie, etc.) [27] (figure 2). L’os représente le site de stockage à long terme de l’uranium qui se trouve essentiellement concentré à proximité des zones vascularisées et des zones de calcification active. Le comportement de l’uranium dans le squelette est comparable à celui des éléments alcalino-terreux [28]. Sa fixation à la surface de l’os se fait par échange d’ions uranyle UO22+ avec les ions Ca2+ présents dans les cristaux d’hydroxyapatite [19, 29]. Dans les cellules tubulaires proximales du rein, l’uranium précipite sous forme de phosphate d’uranyle. Ces microprécipités insolubles sont alors déversés dans la lumière du néphron et éliminés dans les urines sous forme de grains submicroscopiques [30].Des travaux menés sur le rat contaminé de façon chronique à l’uranium (1 mg par jour) montrent que ce radionucléide s’accumule dans la plupart des organes (reins, squelette, intestin, cerveau, muscle, foie…) selon un processus complexe [31]. L’ingestion chronique d’uranium conduit à un profil irrégulier, caractérisé par des pics d’accumulation à 3, 10 et 19 mois de contamination, entrecoupés de retour à des niveaux d’accumulation peu élevés.
Excrétion et élimination
Après ingestion, la majeure partie de l’uranium n’est pas résorbée et est éliminée via les fèces [32]. En revanche, l’excrétion de l’uranium solubilisé qui circule dans le sang est essentiellement urinaire. La mesure de l’uranium urinaire permet de suivre l’élimination d’une partie de l’uranium ayant été absorbé. Environ la moitié de l’uranium absorbé est éliminée dans les urines dès le premier jour, 70 % sont éliminés dans les 10 jours et 85 % après trois mois [33]. Avec une demi-vie de rétention allant de 300 à 5 000 jours, l’élimination de l’uranium stocké dans les os est beaucoup plus lente [32]. Ainsi une fraction de l’uranium absorbé reste piégée dans l’os pendant plusieurs dizaines d’années.
Toxicité
L’os et le rein étant respectivement les organes de stockage à long terme et à court terme de l’uranium, ils ont été décrits comme les premières cibles de la toxicité de l’uranium. La néphrite est effectivement le principal signe clinique dû à l’uranium mais de nombreux autres tissus sont affectés suite à la contamination par l’uranium.L’uranium possède une double toxicité : une toxicité chimique due à sa nature de métal lourd et une toxicité radiologique due à sa nature de radioélément. La toxicité radiologique varie en fonction de son isotopie et de son degré d’enrichissement en 235U. A l’inverse, quel que soit l’isotope considéré, le risque chimique reste identique. Lors d’une contamination par de l’uranium naturel ou appauvri, la toxicité chimique est prépondérante. En revanche, plus l’activité spécifique du composé uranifère est importante (comme c’est le cas pour l’uranium enrichi), plus le risque radiotoxique est à prendre en considération. Pour les risques chimiques et radiologiques, deux types d’effets sont à distinguer : les effets de toxicité dite aiguë qui correspondent à une exposition à une forte dose pendant un temps court et les effets de toxicité dite chronique qui correspondent à une exposition à long terme mais à des doses plus faibles.
Il est généralement admis que le rein, organe de stockage à court terme, est le siège de la chimiotoxicité de l’uranium et que l’os, tissu de rétention à long terme, est la cible de la radiotoxicité. Cependant, certaines études décrivent des effets neurotoxiques, hépatotoxiques, génotoxiques et embryonnaires qui pourraient également jouer un rôle non négligeable dans la toxicité de ce radionucléide.
Toxicité à forte dose
Effets sur le rein
L’effet néphrotoxique de l’uranium est dû essentiellement à ses propriétés chimiotoxiques. La dose létale 50 (DL50) par voie orale est de 204 mg/kg chez le rat et de 242 mg/kg chez la souris (tableau 3). C’est la toxicité rénale (néphrite tubulaire aiguë) qui entraîne la mort de l’animal [34]. Chez l’homme, la DL50 pour une prise orale d’uranium soluble dépasse plusieurs grammes d’uranium par kg [35].A forte dose, l’uranium est capable d’induire des néphropathies sévères affectant surtout les tubules proximaux, mais également les structures glomérulaires [28, 36, 37]. Des études histologiques et morphologiques révèlent une altération de l’architecture de l’épithélium glomérulaire [37] et une nécrose cellulaire au niveau de l’épithélium tubulaire proximal [36]. Malgré cette nécrose rénale, l’épithélium tubulaire est capable de se régénérer. Après injection répétée de fluorure d’uranyle UO2F2 (à une dose de 0,66 ou 1,32 mg U/kg de poids corporel), une étude histologique chez le rat révèle une nécrose massive des tubules proximaux (au niveau des segments terminaux) suivie d’une régénération de l’épithélium après l’arrêt du traitement [36]. Cependant, les cellules lésées sont apparemment remplacées par des nouvelles cellules structurellement différentes et dépourvues de certaines capacités fonctionnelles [22]. Une étude réalisée in vitro montre qu’à forte concentration, l’uranium peut déclencher l’apoptose par activation des caspases 3 et 9 (protéases à cystéine) activées par des signaux intrinsèques via la mitochondrie [38].
Une exposition aiguë à l’uranium se caractérise également par des anomalies fonctionnelles telles que la polyurie, l’enzymurie, la protéinurie et l’élévation sanguine de la créatinine et de l’urée [34, 36, 39, 40]. La sévérité et la réversibilité des lésions dépendent de la concentration d’uranium dans les reins et du temps d’exposition. En 1959, la Commission internationale de protection radiologique a recommandé une concentration maximale admissible en uranium de 3 μg/g de rein. Cependant, cette valeur seuil est aujourd’hui très discutée. En effet, des nécroses cellulaires des tubules proximaux accompagnées d’une protéinurie et d’une enzymurie sont observées chez des animaux contenant des concentrations d’uranium dans les reins bien inférieures à la dose recommandée (0,7 à 1,4 μg U/g de poids de rein) [36]. L’administration aiguë d’UA (204 mg/kg) à des rats perturbe également le métabolisme rénal de la vitamine D aboutissant à des variations de son taux plasmatique [41].
L’un des mécanismes de toxicité de l’uranium au niveau rénal pourrait être dû à l’acidité accrue du tubule proximal entraînant la dissociation du complexe d’uranium et les ions uranyles peuvent alors se combiner avec des composants de la membrane luminale [42, 43]. Dans la cellule, les ions uranyles s’accumulent principalement dans les lysosomes pour former des aiguilles de phosphate d’uranyle, mais également dans les mitochondries [30, 44].
Tableau 3 Synthèse des effets toxiques de l’uranium.
Doses | Effets toxiques | Références | ||
Reins | Données animales | 120 à 240 μg d’U/kg de poids corporel (injections intrapéritonéales multiples) | Atteintes tubulaires | Diamond et al. 1989 |
2 mg d’U/kg de poids corporel (injection intraveineuse) | Atteintes glomérulaires | Kobayashi et al. 1984 | ||
10 mg d’U/kg de poids corporel (injection sous-cutanée) | Atteintes tubulaires et glomérulaires | Domingo et al. 1987 | ||
10 mg d’U/kg de poids corporel (injection sous-cutanée) | Atteintes tubulaires et glomérulaires | Haley et al. 1982 | ||
204 mg/kg de poids corporel (administration intragastrique) | Modifications du métabolisme de la vitamine D | Tissandié et al. 2006 | ||
25 mg d’U/kg de poids corporel (injection intraveineuse) | Atteintes tubulaires et glomérulaires | Blantz 1975 | ||
Os | Données in vitro | Traitement de cellules ostéoblastiques humaines avec 10 à 250 μM d’U | Transformation en cellules cancéreuses | Miller et al. 1998 |
Données animales | 2 mg d’U/kg de poids corporel (injection intrapéritonéale) | Inhibition formation osseuse | Gluglielmotti et al. 1985 | |
0,2 à 2 mg d’U/kg de poids corporel (injection intramusculaire) | Inhibition formation osseuse et augmentation résorption osseuse | Fukuda et al. 2006 | ||
0,8 et 2 mg d’U/kg de poids corporel (injection intrapéritonéale) | Inhibition formation osseuse et augmentation résorption osseuse | Ubios et al. 1991 | ||
Système nerveux central | Données animales | 10 ou 210 mg d’U/kg de poids corporel (administration orale ou sous-cutanée) | Signes cliniques de neurotoxicité | Domingo et al. 1987 |
144 μg d’U/kg de poids corporel (injection intrapéritonéale) | Abaissement de la quantité de sommeil paradoxal | Lestaevel et al. 2005b | ||
Implants sous-cutanés contenant 99,25% d’U | Modifications de l’electrophysiologie de l’hippocampe | Pellmar et al. 1999b | ||
Reproduction | Données animales | 5 à 50 mg d’U/kg de poids corporel/jour pendant la période de gestation (administration orale) | Toxicité maternelle et fœtale | Domingo et al. 1989 |
10 à 80 mg d’U/kg de poids corporel/jour pendant 64 jours (administration orale) | Altération du tissu interstitiel dans les testicules et vacuolisation des cellules de Leydig | LLobet et al. 1991 | ||
5 à 25 mg d’U/kg de poids corporel/jour pendant 14 à 60 jours (administration orale) | Perturbation croissance et développement et augmentation létalité embryonnaire | Paternain et al. 1989 | ||
Foie | Données animales | 10 ou 210 mg d’U/kg de poids corporel (administration orale ou sous-cutanée) | Modifications histologiques | Domingo et al. 1987 |
Inhalation de poussières d’U à 19±8 mg U/m3 (6 h par jour, 5 jours par semaine pendant 1 à 11 mois) | Nécroses focales | Cross et al. 1981 | ||
11,5 mg d’U/kg de poids corporel (injection sous-cutanée) | Atteinte fonction hépatique | Gueguen et al. 2006b | ||
0,1 à 2 mg d’U/kg de poids corporel (administration intra-trachéale) | Atteinte fonction hépatique | Pasanen et al. 1995 | ||
Système gastro-intestinal | Données animales | 204 mg d’U/kg de poids corporel (administration intra-gastrique) | Perturbation du système immunitaire intestinal |
Dublineau et al. 2006 |
Effets sur l’os
L’os étant le site de stockage à long terme de l’uranium, il est la cible potentielle de la radiotoxicité et de la chimiotoxicité. Des cancers osseux (ostéosarcomes) ont été observés chez les animaux exposés à l’uranium présentant des activités spécifiques élevées (232U ou233U). En revanche, aucun cancer n’a été décrit chez l’animal après incorporation d’UN [22].Des études réalisées in vitro ont montré que l’UA sous forme soluble transforme des cellules ostéoblastiques humaines (cellules cubiques situées à la surface externe et interne du tissu osseux en croissance et impliquées dans la formation osseuse) en cellules cancéreuses [45].
In vivo, l’uranium est capable d’inhiber la formation osseuse et d’augmenter la résorption osseuse. Ces effets sont attribués aux propriétés chimiotoxiques de l’uranium [46-48]. Ubios et al. observent chez le rat la diminution de la formation de l’os cortical couplée à une augmentation de la résorption osseuse, 14 jours après injection intrapéritonéale de nitrate d’uranyle (UNO3) (2 mg/kg de poids corporel). Les auteurs suggèrent que l’uranium pourrait contribuer à l’ostéoporose ou à d’autres pathologies osseuses chez les individus exposés.
Effets sur le système nerveux central
Chez l’homme, la neurotoxicité de l’uranium n’a pas été clairement démontrée. Cependant, une étude révèle des troubles du comportement tels que des états de dépression ou d’agitation chez des travailleurs exposés à de fortes doses d’uranium [49].Chez l’animal, l’administration orale ou sous-cutanée d’acétate d’uranium (10-210 mg U/kg) conduit à l’apparition de signes cliniques de neurotoxicité tels que tremblements, hypothermie, et un myosis [34]. De plus, un abaissement de la quantité de sommeil paradoxal est observé chez le rat après une injection subnéphrotoxique d’UA (144 μg/kg) [50]. A une dose néphrotoxique (576 μg/kg), l’injection d’uranium provoque au niveau du système nerveux central une oxydation lipidique et des dommages histopathologiques [51].
L’accumulation de l’uranium dans le cerveau est mise en évidence chez des rats implantés avec des fragments d’UA simulant des blessures d’éclat d’obus [52]. L’uranium est capable de traverser la barrière hématoencéphalique et se distribue de façon hétérogène dans les structures cérébrales [52-54]. Sa distribution est dépendante de la dose [52]. Ainsi l’uranium se concentre préférentiellement dans certaines structures, notamment au niveau du cervelet, du mésencéphale, de l’hippocampe et du cortex où il pourrait induire un effet toxique. Chez les rats portant des implants sous-cutanés d’UA, Pellmar et al. constatent des modifications de l’électrophysiologie de l’hippocampe et suggèrent que ces effets pourraient être une conséquence directe de l’accumulation d’uranium dans cette structure [55].
Effets sur la reproduction
La toxicité de l’uranium sur le développement et la reproduction a été observée principalement chez la souris lorsque l’uranium est administré par voie orale ou par injection [56]. L’ingestion d’uranium pendant l’organogenèse induit une toxicité maternelle et fœtale. En effet, Domingo et al. [57] rapportent une réduction de la prise de poids, une diminution de la prise alimentaire et une augmentation du poids du foie chez les souris femelles après gavage pendant la période de gestation (quantités d’uranium comprises entre 5 et 50 mg d’acétate d’uranyle/kg/jour). Chez le fœtus, ils constatent également l’apparition de malformations (palatoschisis ou fissures congénitales du palais et malformations du sternum). Les auteurs décrivent des troubles de l’ossification voire une absence d’ossification du squelette.Aucun effet sur la fertilité n’est mis en évidence après administration d’uranium à des doses comprises entre 5 et 25 mg/kg/jour [58]. En revanche, une diminution du nombre de nouveau-nés due à une augmentation de la mortalité in utero, une augmentation de la létalité des embryons ainsi qu’une perturbation de la croissance et du développement des souriceaux ont été notées pour les doses d’uranium les plus élevées. Malgré l’absence d’effet constaté sur la spermatogenèse, Llobet et al. [59] rapportent des altérations du tissu interstitiel dans les testicules et une vacuolisation des cellules de Leydig chez les souris mâles exposées à l’uranium via l’eau de boisson pendant 64 jours avant l’accouplement (quantités d’acétate d’uranyle comprises entre 10 et 80 mg d’uranium/kg/jour).
Effets sur le foie
Quelques études récentes montrent que le foie serait également le siège de la toxicité de l’uranium. Des modifications histologiques telles que l’apparition de lésions après exposition à de fortes doses d’uranium sont décrites [34]. Des nécroses focales sont observées au niveau du foie chez le hamster après une exposition aiguë et à forte dose à l’uranium [60]. Une élévation des taux plasmatiques des transaminases ALAT ou TGP (alanine amino transférase ou transaminase glutamique pyruvique) et ASAT ou TGO (aspartate amino transférase ou transaminase glutamique oxalo-acétique) traduisant une altération de la perméabilité membranaire et éventuellement une nécrose hépatique est observée après injection sous-cutanée d’uranium chez le rat [34, 61]. Des anomalies fonctionnelles telles que la diminution des triglycérides sont également décrites [61]. Au niveau moléculaire, l’inhalation de dioxyde d’uranium induit une modification de l’activité d’enzymes de type cytochromes P450 (CYPs) hépatiques impliquées dans le catabolisme de la testostérone [62]. D’autre part, dans le foie, l’activité de la CYP27A1 qui assure le métabolisme du cholestérol et de la vitamine D, ainsi que l’activité et l’expression des CYP3A impliquées dans le métabolisme des xénobiotiques sont aussi perturbées chez le rat quelques jours après l’administration d’UA [61] ce qui peut conduire à l’altération du métabolisme de certains médicaments [63, 64].
Effets sur les poumons
Lors d’une contamination par inhalation, les poumons constituent la première cible biologique potentielle pour l’uranium. Divers effets ont été décrits sur les poumons après exposition aiguë par l’uranium : réaction inflammatoire, stress oxydatif, effet génotoxique, ou modification de l’expression des cytochromes P450 [62, 65, 66]. Le développement d’une réaction inflammatoire constitue l’effet majeur induit par les particules d’uranium, que ce soit après instillation intratrachéale [62] ou inhalation [66]. L’analyse histologique a pu mettre en évidence que les cellules inflammatoires sont présentes à proximité des agrégats de particules d’uranium [62, 65]. Cette réaction inflammatoire s’accompagne de l’induction de différentes cytokines pro- (IL-8, TNFα) et anti-inflammatoires (IL-10) [66]. L’induction d’une réaction inflammatoire par l’uranium peut expliquer la diminution de l’activité enzymatique de certains cytochromes P450 à trois jours post-instillation, ces enzymes étant connues comme sensibles à l’inflammation [62]. La question se pose de la réversion ou du maintien de cette réaction inflammatoire sur le long terme. D’autre part, il est à noter qu’aucune donnée n’est disponible sur les éventuels effets à court terme d’une exposition aiguë à l’uranium sur les poumons dans le cas d’autre mode de contamination, blessure ou ingestion.Afin de décrire au mieux les mécanismes d’action de l’uranium dans les poumons, différents auteurs ont étudié l’effet de l’uranium in vitro sur des cultures cellulaires de macrophages impliqués dans l’épuration pulmonaire [67-71]. L’ensemble de ces résultats permet de construire une proposition de succession d’événements pour expliquer les différents effets observés de l’uranium. La première étape est l’incorporation d’uranium par les macrophages qui se fait dans les 2 heures qui suivent l’exposition [69]. Cette incorporation conduit à l’induction de la voie transcellulaire passant par la jun kinase impliquée dans la régulation de l’apoptose [67, 70]. L’apparition de cellules soit en apoptose, soit en nécrose pro-apoptotique est observée dès 6 heures post-exposition [68, 69]. Enfin, l’activation de la voie JNK induit l’expression de cytokines pro-inflammatoires telles que TNFα ou IL-6 [67, 70, 71].
Par ailleurs, une étude réalisée sur une lignée de cellules épithéliales de rat a mis en évidence l’induction d’un stress oxydatif suivi par une diminution des défenses anti-oxydantes dès 30 minutes après exposition à l’uranium [72]. Cet effet oxydant de l’uranium est suivi dans les 24 heures par une diminution de la prolifération de ces cellules, qui est attribuée à une diminution des défenses antioxydantes.
Enfin, parmi les effets induits par l’uranium régulièrement cités figurent les effets génotoxiques. A notre connaissance, une seule étude a montré un effet génotoxique visualisé par un test de comet sur les macrophages alvéolaires 24 heures après inhalation aiguë, mais seulement pour la dose la plus forte [66]. Cela semble indiquer que l’uranium n’induit pas d’effet marqué en termes de génotoxicité à court terme après inhalation aiguë.
Effets sur le système digestif
Le système digestif est probablement à l’heure actuelle le système physiologique pour lequel les éventuels effets de l’uranium sont les moins bien connus, alors que ce système constitue la voie d’entrée des toxiques lors d’une exposition par ingestion. Le tractus gastro-intestinal a développé un certain nombre de mécanismes de défense immunologiques et non immunologiques afin de pouvoir répondre à l’entrée de toxiques dans l’organisme via la voie orale. Les éventuels effets de l’uranium sur ces deux types de défense sont très peu décrits dans la littérature, même si quelques études se sont attachées à décrire l’absorption gastro-intestinale d’uranium [18, 20, 27, 73].Les premières études portant sur l’effet d’une exposition aiguë à forte dose d’uranium ont été réalisées en 1966 [74], puis en 1985-1986 [75, 76]. Ces études ont mis en évidence que les deux composantes principales de la paroi intestinale, à savoir l’épithélium et les muscles lisses intestinaux, étaient touchées par une contamination par l’uranium. En effet, une inhibition du transporteur de sucres dans le jéjunum de rat a été rapportée [74, 76], ainsi qu’une stimulation des contractions du muscle longitudinal d’iléon de cochon d’Inde [75]. Ces études indiquent donc que l’uranium, en tout cas à forte dose, peut avoir une action sur différents types de transporteurs présents dans l’intestin. Plus récemment, une étude a été réalisée à court terme après administration intragastrique de nitrate d’uranium afin d’évaluer la toxicité de ce radionucléide sur l’épithélium intestinal [77]. Les résultats de cette étude montrent une absence de modification dans les processus de prolifération, de différenciation et d’apoptose au niveau de l’épithélium iléal. Par ailleurs, le statut immunitaire de l’intestin a également été estimé via la quantification d’un certain nombre de cellules immunitaires (lymphocytes cytotoxiques, lymphocytes helper, neutrophiles) et de l’expression génique et protéique de cytokines pro- et anti-inflammatoires [77]. Une diminution du taux protéique de CCL-2, la chimiokine attractante pour les macrophages, ainsi qu’une augmentation du taux d’ARNm d’IFNγ est respectivement observée à 1 et 3 jours post-contamination. En revanche, aucune modification dans la localisation et la densité des populations cellulaires observées n’a été notée. En conclusion, cette étude montre que les propriétés de barrière et d’immunité mucosale de l’intestin ne sont que peu touchées à court terme par une administration orale d’uranium appauvri à forte dose, malgré le fait que le segment étudié, l’iléon, soit le site privilégié de passage de l’uranium en cas d’administration orale [24]. Cependant, les modifications induites par l’uranium sur les taux de cytokines et chimiokines de la muqueuse intestinale suggèrent qu’à long terme, et dans le cas d’une contamination chronique, des effets pourraient être observés sur le statut immunitaire de l’intestin.
In vitro, une seule étude a été effectuée [78]. Les auteurs ont comparé des cellules épithéliales de côlon à différents niveaux de différenciation, afin d’estimer la toxicité cellulaire de l’uranium sur ces cellules, ainsi que l’effet génotoxique de l’uranium. Un effet génotoxique est observé dans les cellules prénéoplastiques et hautement transformées, mais non dans les cellules normales. Il semble notamment que le gène TP53 suppresseur de tumeurs soit sensible à l’acétate d’uranium, en tout cas pour de fortes concentrations.
Toxicité à faible dose
Comparées aux connaissances acquises après exposition aiguë, peu de données sont disponibles sur les effets biologiques d’une contamination chronique à l’uranium (tableau 4). Pourtant ces expositions par ingestion chronique de faibles quantités via l’alimentation et l’eau de boisson constituent le principal mode d’exposition de la population.
Effets sur les deux principaux organes cibles d’uranium : l’os et le rein
Les données obtenues chez l’homme démontrent que même pour des apports quotidiens faibles, l’ingestion d’uranium peut altérer la fonction rénale. Ainsi, dans une étude canadienne (concentrations moyennes d’uranium dans l’eau de 0,71 μg/L, 16,6 μg/L et 14,7 μg/L), une association statistiquement significative a été observée entre l’exposition à l’uranium (concentrations dans l’eau, durée d’exposition) et l’albumine urinaire, indicateur d’un dysfonctionnement rénal [79]. De plus, Zamora et al. [80] montrent dans une population de la Nouvelle-Ecosse (concentrations moyennes d’uranium dans l’eau de 2 à 781 μg/L), une corrélation positive des phosphatases alcalines et de la bêta-2-microglobuline urinaires avec l’augmentation d’incorporation d’uranium évoquant une atteinte des tubules proximaux. Enfin, une autre étude a permis d’observer des effets tubulaires (calciurie, phosphaturie et polyurie) associés à la présence d’uranium dans l’eau potable [81]. Cependant, aucun signe d’atteinte glomérulaire n’a été mis en évidence lors de ces études. Chez l’homme, des effets toxiques sur l’os ont été également mis en évidence. Une étude épidémiologique réalisée en Finlande révèle une association entre le taux d’uranium dans l’eau potable et l’augmentation des phases de résorption/synthèse de l’os. En effet, les auteurs observent l’augmentation d’un marqueur de la résorption osseuse (télopeptide C-terminal du collagène de type-I, CTX) et d’un marqueur de la formation osseuse (ostéocalcine) [82].Chez l’animal, l’ingestion d’uranium pendant 91 jours à une concentration de 0,96 mg de nitrate d’uranyle (UNO3) par litre d’eau de boisson induit des lésions au niveau du rein, caractéristiques de la toxicité de l’uranium [83]. Ces lésions concernent les tubules contournés proximaux (vacuolisation cytoplasmique, vésicule nucléaire, dilatation tubulaire) mais aussi les glomérules. Cette étude impliquant des animaux exposés à des concentrations allant de 0,96 à 600 mg/L d’uranium indique que les modifications histopathologiques observées au niveau du rein sont dépendantes de la dose ingérée. Chez le rat, l’analyse microscopique des tubules proximaux révèle une augmentation du nombre de vésicules contenant des granules d’oxyde de fer après ingestion chronique d’UA. Le nombre de ces vésicules augmente avec la durée d’exposition à l’uranium. Dans cette étude, les auteurs suggèrent que l’uranium rentrerait en compétition avec le fer, entraînant ainsi une excrétion préférentielle de l’uranium et une surcharge en fer dans la cellule tubulaire [84]. De plus, des modifications du métabolisme rénal de la vitamine D sont observées chez le rat après ingestion chronique d’UA ou d’UE contenu dans l’eau de boisson (40 mg/L) [85, 86]. Plus particulièrement, l’exposition à l’uranium modifie l’expression du récepteur à la vitamine D, VDR (Vitamin D Receptor), qui intervient dans la réponse biologique de cette vitamine, ainsi que le taux circulant de vitamine D dont la régulation est essentiellement rénale.
Lors d’une exposition chronique, le tissu osseux peut contenir 66 à 75 % de la charge corporelle en uranium [19, 22]. Chez le rat, la contamination chronique par implantation sous-cutanée de poudre de dioxyde d’uranium UO2 révèle une inhibition de la formation osseuse [87], comme il a été décrit après intoxication aiguë à l’uranium. Par ailleurs, Miller et al. suggèrent qu’une exposition à long terme à l’UA pourrait provoquer des cancers osseux chez l’homme [88].
Tableau 4 Synthèse des effets biologiques induits après contamination chronique à l’uranium chez l’homme et l’animal.
Doses | Effets toxiques | Références | ||
Reins | Données animales | 0,96 à 600 mg d’U/l d’eau de boisson pendant 91 jours | Atteintes tubulaires et glomérulaires | Gilman et al. 1998a |
40 mg d’U/l d’eau de boisson | Atteintes tubulaires | Donnadieu-Claraz et al. 2007 | ||
40 mg d’U/l d’eau de boisson | Modifications du métabolisme de la vitamine D | Tissandié et al. 2007a; 2007b | ||
Données humaines | 2 à 781 µg d’U/l d’eau de boisson | Atteintes tubulaires | Zamora et al. 1998 | |
28 µg d’U/l d’eau de boisson | Atteintes tubulaires | Kurttio et al. 2002 | ||
0,71, 16,6 ou 14,7 µg d’U/l d’eau de boisson | Atteintes tubulaires | Mao et al. 1995 | ||
Os | Données animales | 0,125 mg de U/kg de poids corporel pendant 30 jours (implantation sous-cutanée) | Inhibition formation osseuse | Diaz Sylvester et al. 2002 |
Données humaines | 27 µg d’U/l d’eau de boisson | Augmentation turnover osseux | Kurttio et al. 2005 | |
Foie | Données animales |
|
Atteinte fonction hépatique | Ortega et al. 1989 |
0,96 à 600 mg d’U/l d’eau de boisson pendant 91 jours | Lésions histologiques | Gilman et al. 1998b | ||
40 mg d’U/l d’eau de boisson | Modifications du métabolisme des xénobiotiques | Souidi et al. 2005 ; Gueguen et al. 2007 | ||
Système nerveux central | Données animales | 40 mg d’U/l d’eau de boisson | Modification comportement | Houpert et al. 2005 |
Augmentation sommeil paradoxal | Lestaevel et al. 2005 | |||
40 mg d’U/l d’eau de boisson | Perturbation neurotransmission | Bussy et al. 2006 | ||
Données humaines | Soldats exposés à U à partir de fragments d’obus | Déficits neurocognitifs | Mc Diarmid et al. 2000 | |
Gonades | Données animales | 40 mg d’U/l d’eau de boisson | Augmentation testostérone | Grignard et al. 2007 |
0,5 à 60 µg U/l d’eau de boisson | Modification de la maturation folliculaire ovarienne | Raymond-Whish et al. 2007 |
Effets sur le système nerveux central
Au niveau du système nerveux central, des troubles neurologiques ont été observés chez de nombreux vétérans à la suite de la guerre du Golfe ; ces troubles sont rassemblés sous la terminologie « Syndrome de la guerre du Golfe ». Ils sont la conséquence de facteurs multiples parmi lesquels figure l’uranium appauvri [89].Plusieurs études expérimentales suggèrent que le cerveau constituerait une cible privilégiée de la toxicité de l’uranium. Son accumulation cérébrale est hétérogène d’une structure cérébrale à l’autre et dose-dépendante [31, 52]. Après ingestion de 40 mg/L d’UA pendant plusieurs mois (soit 1 mg/jour/rat), des perturbations des systèmes de neurotransmission dopaminergique et sérotoninergique sont observées chez le rat [90]. Dans ces conditions expérimentales (40 mg/L d’uranium), l’uranium appauvri n’induit pas d’effet sur l’anxiété ou le sommeil paradoxal chez le rat [91-93]. En revanche, l’uranium enrichi à 4,26 % en 235U provoque une augmentation de la quantité de sommeil paradoxal, une baisse de la mémoire à court terme et une hausse de l’anxiété [91-93]. D’autres équipes ont démontré que l’uranium appauvri est capable d’augmenter l’activité locomotrice et de perturber la mémoire spatiale [94, 95].
Les mécanismes d’action par lesquels l’uranium exerce ces effets centraux sont totalement inconnus. Néanmoins, lors d’une étude comportementale, des auteurs ont montré chez le rat mâle une augmentation de la peroxydation lipidique dans le cerveau suggérant une atteinte des membranes cellulaires par augmentation du stress oxydant et des radicaux libres [94]. Par ailleurs, Linares et al. ont également démontré l’existence d’une corrélation entre la concentration en uranium dans l’hippocampe et une augmentation de l’activité enzymatique de deux enzymes anti-oxydantes, la super-oxyde dismutase (SOD) et la catalase (CAT) dans cette région du cerveau [96]. Ces résultats expérimentaux suggèrent que le stress oxydant jouerait un rôle important dans le mécanisme d’action neurotoxique de l’uranium, mais ce n’est sans doute pas le seul.
Effets sur les organes sexuels
Chez l’homme, et plus précisément chez les vétérans de la guerre du Golfe, présentant des fragments d’uranium dans le muscle suite à des blessures, plusieurs études n’ont pas permis de mettre en évidence, quel que soit le taux d’uranium excrété, des modifications de la fonction reproductrice (pas de modifications des taux plasmatiques hormonaux (testostérone, FSH, LH), ni des paramètres spermatiques [97-99]. En revanche, une étude épidémiologique réalisée en Namibie sur des mineurs d’uranium a montré une diminution de leur taux de testostérone [100].Afin de mimer des situations de contamination des populations via l’eau de boisson, des études ont été réalisées sur des rongeurs. Chez la souris femelle, des contaminations avec des doses de 0,5 μg/L à 28 mg/L (doses retrouvées dans l’eau de boisson de certaines régions des États-Unis) montrent que l’uranium peut être considéré comme un perturbateur endocrinien. En effet, il modifie le développement et la maturation folliculaire ovarienne, accélère l’ouverture vaginale et augmente le poids de l’utérus [101]. Ces effets sont bloqués par un anti-estrogène, montrant ainsi l’implication des récepteurs aux estrogènes. Par ailleurs, une étude récente a montré qu’une contamination de rats mâles par de l’UE (40 mg/L) perturbe le métabolisme des hormones stéroïdiennes testiculaires [102]. En effet, il a été mis en évidence une augmentation du taux de testostérone plasmatique, ainsi qu’une augmentation de l’expression des gènes codant pour des enzymes de synthèse des hormones stéroïdiennes et pour des récepteurs nucléaires modulant l’expression de ces enzymes. Cependant, une contamination identique (40 mg/L) par de l’UA n’induit aucune modification de ces paramètres. Dans cette étude, il semblerait que le métabolisme testiculaire des hormones stéroïdiennes soit plus sensible à l’UE possédant une double toxicité (chimique et radiologique) qu’à l’UA (toxicité essentiellement chimique).
Ces différents résultats semblent indiquer que le système reproducteur est sensible à des contaminations environnementales par de l’uranium. Cependant, cette sensibilité diffère en fonction de la voie de contamination, du modèle et du sexe.
Effets sur le foie
Le foie est également une cible biologique de l’uranium après une exposition chronique. Une augmentation du taux des transaminases TGO et TGP [103], ainsi que des lésions histologiques au niveau du foie [104] sont observées chez le rat lors de contaminations chroniques par ingestion d’uranium contenu dans l’eau de boisson. Tout comme lors d’une exposition aiguë, les cytochromes P450, qui sont prépondérantes dans le foie, sont des cibles d’une exposition chronique par l’UA. Récemment, il a été montré qu’après une contamination chronique de neuf mois par de l’UA (40 mg/L), l’expression de certaines enzymes de la phase I (CYP3A) est augmentée dans le foie, alors que l’expression des enzymes de la phase II (GST, UGT) et des transporteurs de la phase III (MDR1, MRP2) du métabolisme des xénobiotiques ne varient pas [105, 106]. En conséquence, il a été émis l’hypothèse que la pharmacocinétique – donc la biodisponibilité – des médicaments pourrait être modifiée et conduire à une toxicité médicamenteuse ou une inefficacité thérapeutique lors d’un traitement médicamenteux chez des individus exposés à l’uranium. Cette hypothèse a été testée avec un traitement par le paracétamol (500 mg/kg) [105], un médicament potentiellement hépatotoxique. Dans cette étude il a été décrit que les animaux contaminés par l’UA éliminaient moins rapidement le paracétamol plasmatique. De plus, l’administration de paracétamol aux rats contaminés par l’UA augmente les transaminases plasmatiques (TGO, TGP) plus rapidement que pour les animaux non contaminés. Dans le foie, les activités des CYPs sont également diminuées pour les animaux contaminés par rapport aux animaux témoins. Ces études confirment que le métabolisme des xénobiotiques (médicaments) est altéré lors d’une exposition chronique par l’UA.
Effets sur les poumons
Lors d’une contamination essentiellement par inhalation, les poumons constituent la première cible biologique pour l’uranium. En effet, après contamination interne les particules d’uranium insoluble s’accumulent dans les poumons et les ganglions lymphatiques [107-109]. Dans ce cas, le poumon pourrait être non seulement confronté à la toxicité chimique, mais aussi à la toxicité radiologique qui pourrait devenir non négligeable à long terme.Après contamination interne, les particules d’uranium atteignent principalement deux cibles cellulaires au niveau pulmonaire, les macrophages et les cellules épithéliales [110]. L’interaction entre uranium et cellules épithéliales peut être directe et entraîner des dommages biologiques sur l’épithélium [110], conduisant à une altération de la fonction respiratoire. Les macrophages sont impliqués dans l’épuration des particules d’uranium et dans leur rétention dans le compartiment alvéolaire [111]. Après phagocytose de l’uranium par les macrophages, il se concentre essentiellement au niveau des lysosomes [112, 113]. Ainsi, les macrophages sont responsables de la redistribution de ce radionucléide dans le poumon et la formation de zones d’accumulation [114, 115] pouvant induire des œdèmes pulmonaires et une inflammation des bronches et des alvéoles. De plus, des études ont rapporté que des expositions chroniques de longue durée à des oxydes d’uranium induisent une prolifération cellulaire et des zones de fibrose et/ou de nécrose [107, 108, 116]. Récemment, une étude chez l’animal a mis en évidence un effet d’une contamination interne par l’uranium sur le système de détoxication des xénobiotiques au niveau pulmonaire [106]. En effet, Cette étude montre qu’une contamination chronique par ingestion d’uranium induit une modification au niveau génique de l’expression de la CYP3A2 impliquée dans le métabolisme des xénobiotiques ainsi qu’un des facteurs de transcription associé CAR. Ces différentes études montrent clairement que le poumon est une cible biologique de l’uranium après contamination chronique par inhalation ou ingestion.
Chez l’homme, des études sur des mineurs d’uranium ont montré une augmentation des fibroses pulmonaires et du risque de cancer du poumon avec une relation linéaire entre le risque de cancer du poumon et la radioexposition due au radon [117-119]. Les effets cancérigènes observés sont expliqués plutôt par l’irradiation de l’épithélium bronchique. Des études complémentaires chez l’animal et d’autres études épidémiologiques chez l’homme sont nécessaires afin de répondre plus précisément sur l’impact d’une contamination interne chronique sur le poumon.
Effets sur l’intestin
Les études effectuées à court terme sur le système digestif ont montré que l’uranium n’avait que peu d’effets sur les propriétés intestinales, excepté à forte dose et in vitro [74]. Le nombre d’études portant sur les conséquences (en termes de bioaccumulation et d’effets biologiques) à plus ou moins long terme d’une contamination chronique d’uranium est relativement faible. En ce qui concerne les phénomènes de bioaccumulation dans l’intestin, une étude exhaustive, réalisée à différents temps de contamination par l’uranium sur de nombreux organes, a montré qu’une ingestion chronique d’uranium appauvri conduisait à une accumulation de ce radionucléide dans l’intestin grêle dès le premier mois d’exposition, suivie par une décroissance régulière au fur et à mesure de la contamination [31]. Une étude plus précise en termes d’accumulation a mis en évidence que l’uranium était plus particulièrement localisé au niveau des plaques de Peyer, follicules lymphoïdes insérés dans la paroi intestinale [120]. Cependant, cette accumulation ne s’accompagne pas d’effets biologiques marqués, comme l’indique l’absence de modification du taux d’ARNm des cytokines dans les plaques de Peyer et des processus apoptotique et prolifératif. Paradoxalement, divers effets sont observés au niveau de la muqueuse malgré une accumulation moindre d’uranium [121]. Un des effets observés les plus significatifs en termes d’éventuelle conséquence est la modification de la densité de certaines populations de cellules immunitaires sans modifier leur localisation. Ainsi, une augmentation du nombre de neutrophiles est observée dès trois mois de contamination, effet qui se maintient à neuf mois d’exposition. Une diminution du nombre de mastocytes et de macrophages est également observée après contamination (respectivement à 6 et 9 mois). Ces changements dans la densité cellulaire de neutrophiles (augmentation) et macrophages (diminution) pourraient conduire à la suppression de certains mécanismes de défense ou à l’inverse à l’induction d’une hypersensibilité. Il est par ailleurs intéressant de noter que cette étude met en évidence une inhibition de la voie NOergique, similaire à ce qui a été observé dans le cas d’une exposition au plomb dans différents organes [122].
Conclusion
L’uranium occupe une place unique parmi les actinides. En raison de ses caractéristiques chimiques, il se comporte comme un composé néphrotoxique, indépendamment de ses propriétés radioactives. De plus, en fonction de son isotopie ou de son degré d’enrichissement en 235U, il est considéré comme un composé radiotoxique. Nos connaissances sur la toxicité de l’uranium proviennent d’observations faites chez l’homme, mais surtout d’études sur l’animal qui montrent que l’os et le rein sont les deux principaux organes cibles de l’uranium. Néanmoins, une exposition chronique à l’uranium affecte de nombreuses fonctions physiologiques (physiologie rénale et hépatique, métabolisme osseux), ainsi que le système nerveux central et le système reproducteur. De plus, des modifications de l’homéostasie phosphocalcique et de certains métabolismes (vitamine D, hormones stéroïdiennes et médicaments) sont décrites chez l’animal après contamination à l’uranium. Ainsi, l’exposition chronique à une faible quantité d’uranium est responsable d’atteintes de systèmes biologiques qui ne sont pas forcément corrélés à l’accumulation tissulaire de ce radioélément ; la question de l’effet systémique ou direct reste donc encore sans réponse.L’exposition à l’uranium induit ainsi chez le rat adulte des modifications subtiles mais significatives de plusieurs systèmes physiologiques. La question subséquente à l’observation de ces effets est de savoir si ces modifications sont les signes précurseurs de l’apparition d’une pathologie observable sur le plan clinique, ou si elles sont plutôt le reflet d’une adaptation de la physiologie des organes à cette exposition chronique. Les études présentées étant réalisées chez un modèle rongeur représentatif d’une population adulte et ‘saine’, une des manières de répondre à cette interrogation serait d’évaluer les effets de l’uranium sur d’autres populations, soit chez des individus en croissance dont l’exposition à ce radionucléide se fait de façon simultanée à la mise en place des grands systèmes physiologiques, soit chez des individus ayant des prédispositions à des pathologies particulières.
Remerciements
Les auteurs de cet article ont une pensée émue pour l’amie Francoise Pluchet, qui nous a quittés prématurément.
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